Entretien – Secteur du Cadastre de la Ville de Fribourg – DJI M300

Le secteur du cadastre de la Ville de Fribourg a fait l acquisition d un DJI M300 et l utilise afin d effectuer des missions d intérêt publique depuis 2020 Dans ce contexte et afin de mieux comprendre l usage du drone pour les communes en Suisse nous interviewons aujourd hui Frédéric Giroud géomètre au Secteur du Cadastre
Secteur du cadastre de la ville de Fribourg - drone
Quelles sont les responsabilités du secteur du cadastre de la Ville de Fribourg ?

Frédéric (Secteur du Cadastre) : Le Secteur du cadastre de la Ville de Fribourg est en charge de la gestion des bien-de fonds sur son territoire, y compris les droits et les charges associés. Il s’assure d’un suivi rigoureux non seulement du point de vue cadastral mais également de l’adressage des bâtiments et de la nomenclature. Il contribue également à l’élaboration de nombreux projets urbanistiques en collectant et exploitant des données externes ou par l’acquisition d’éléments topographiques par les équipes en place.

Un guichet cartographique est mis en place et géré par une équipe spécialisée au sein même du Cadastre. La diffusion de données est assurée tout en proposant des solutions adaptées aux demandes.

Ok, et dans ce contexte quelles sont les raisons qui vous ont poussé à acquérir un drone ?
 

Frédéric (Secteur du Cadastre) : J’ai été engagé à la Ville avec comme cahier des charges d’acquérir un drone pour effectuer des missions de monitoring et de surveillance de falaises. Il était primordial d’avoir un appareil fiable, précis et polyvalent, qui affichait une grande autonomie et une bonne résistance aux vent ou aux températures négatives.

La série Matrice de DJI remportait le comparatif de spécifications contre les produits de gamme Mavic ou Phantom de DJI et affichait une plus grande polyvalence d’utilisation que des produits comme les ailes fixes ou multicoptères d’autres constructeurs.

Pourquoi ne pas avoir fait l’acquisition de ces données à l’aide d’avions ou d’autres méthodes d’acquisition de données photographiques classiques ?
 

Frédéric (Secteur du Cadastre) : Le but premier pour nous était la surveillance des falaises. En cas d’événement, il nous fallait pouvoir intervenir le plus rapidement possible pour analyser la situation et permettre au géologue de la Ville de prendre les bonnes décisions pour sécuriser la zone. Avec un drone, nous ne sommes plus dépendant des disponibilités et délais de nos partenaires de vol. La sécurité du personnel était également un point important. Le coût des opérations de vol est également à l’avantage du drone.

M300 Fribourg
Vue aérienne de la ville de Fribourg et de sa topographie

Le Cadastre exploite cet aéronef et il est également très souvent utilisé pour effectuer des missions de mapping ponctuelles, notamment pour la représentation du marquage routier par exemple. Globalement nous constatons un gain de temps considérable à moindre frais. Le matériel a été très vite amorti.

Donc si je comprends bien, le but primaire était de faire du monitoring de falaise mais vous l’utilisez désormais pour beaucoup d’autres tâches. Pour quelles tâches avez-vous utilisé le drone depuis 2020 ?
 

Frédéric (Secteur du Cadastre) : Pour les besoins du Secteur du cadastre, nous avons remplacé certains de nos relevés terrestres par une acquisition aérienne. Pour citer des exemples, il y a la détermination du marquage routier qui évolue sans cesse, ou le contrôle de réalisation de certains projets urbains. Avec la photogrammétrie et la réalisation d’orthophoto, on obtient facilement de l’information, et nous contrôlons l’état de la base de données cadastrales suite aux chantiers afin de mettre à jour cette dernière.

Qu’est-ce qu’une orthophotographie et quel avantage l’orthophotographie faite au Matrice 300 a-t-elle par rapport à d’autres orthophotographies comme celle de swisstopo ?
 

Frédéric (Secteur du Cadastre) : Une orthophotographie ou orthophoto est une image raster 2D en vue aérienne qui peut être géoréférencée afin de correspondre parfaitement au plan cadastral. Les effets de perspectives de la photo initiale sont supprimés, ce qui veut dire qu’il est possible de mesurer des distances directement sur le produit.

L’avantage principal du Matrice 300 dans ce contexte, est la résolution ! Les orthophotos Swissimage de Swisstopo sont formidables, elles couvrent l’entier du pays et le résultat est très bon. Pourtant, l’acquisition est faite par avion à une distance beaucoup plus éloignée du sol. Avec un drone nous volons très près du sol à maximum 120m et le détail de l’image est plus important. Nous avons établi un comparatif visuel pour mieux apprécier la différence :

Comparatif résolution drone
A) SWISSIMAGE 25 cm de 2017 produit par Swisstopo, B) SWISSIMAGE 10 cm de 2020 produit par Swisstopo, C) ORTHOPHOTO 3 cm de 2022 produit par la Ville de Fribourg, D) ORTHOPHOTO 1.2 cm de 2023 produit par la Ville de Fribourg

Le résultat de notre produit résulte de la HD (Haute Définition), ce qui offre un niveau de détail supplémentaire et du coup, offre une plus grande palette de possibilités. La campagne 2023 est en cours et offrira un résultat en UHD (Ultra Haute Définition), tout en préservant les éventuelles données sensibles.

Intéressant et l’effort en vaut la peine ? Que pouvez-vous faire avec cette orthophotographie ?

Frédéric (Secteur du Cadastre) :  Dans notre quotidien, nous utilisons énormément les orthophotos pour divers besoins allant de la simple consultation, à l’appréciation du terrain ou pour l’exploitation de données spécifiques. Il faut voir le produit réalisé comme un outil de travail accessible à toutes et tous.  Chaque utilisateur peut récupérer ses informations par lui-même et c’est dans ce but que nous avons décidé de démarrer ce projet.

Concrètement nous avons besoin de l’entier du territoire pour faire un contrôle général de notre base cadastrale. Avec les multiples travaux en Ville, passablement d’éléments cadastraux sont impactés et tout ne nous est malheureusement pas relayé pour la mise à jour des plans. Avec la détection automatique par IA, cela nous permet de détecter les conflits et de pouvoir traiter les cas afin de revenir progressivement à une situation à jour.

Autre besoin intéressant, nous avons pu exploiter les données 3D issues du calcul de l’orthophoto pour déterminer un modèle 2022 de la canopée en Ville. Ces données sont ensuite traitées par d’autres acteurs à la Ville.

Quelle caméra avez-vous utilisé afin d’effectuer l’orthophotographie de la Ville de Fribourg et quelle précision de l’orthophoto avez-vous obtenu ?

Frédéric (Secteur du Cadastre) : Pour la première édition de notre produit « 2022_VFR_ORTHO_3cm », nous avons utilisé la caméra grand angle de 12MP du produit DJI Zenmuse H20T pour photographier l’ensemble du territoire. Avec une hauteur de vol de 80m sur sol, nous obtenons un pixel pour 3cm sur le terrain. Ce qui représente en soi une excellente résolution de l’image pour une si grande zone. Aujourd’hui avec un nouveau matériel, nous avons améliorer la résolution à 1,2 cm par pixel.

Quelles ont été les difficultés que vous avez rencontrés lors des prises d’orthophotographies ?

Frédéric (Secteur du Cadastre) : Sans hésiter je dirai la topographie très particulière, ici à Fribourg ainsi que les ouvrages d’art. Avec plusieurs falaises et ponts dans les méandres de la Sarine, il a fallu faire des tests de sécurité pour la bonne marche des vols automatisés.

Nous avons dû comprendre le fonctionnement du drone et comment il se comportait devant de fortes déclivités. Nous avons alors créé notre propre Modèle Numérique de Terrain (MNT) afin de faire évoluer le drone dans un environnement sécurisé.

Un autre point important, je dirai le contact visuel. Une parfaite connaissance de la Ville était impérative afin de trouver les bons spots pour décoller et d’où on pouvait garder l’aéronef en contact visuel permanent. Les obstacles nous font perdre le signal avec le drone. La solution était de pouvoir accéder aux toitures des immeubles dominants et cela s’est avéré efficace.

Et bien entendu l’aspect juridique nous a aussi demandé un certain temps. En tant que collectivité publique, nous nous devons d’être irréprochables et sommes pleinement engagés en ce sens. Chaque vol est annoncé à la Police locale qui se charge de relayer l’information à la police cantonale. De  plus, des demandes d’autorisation sont formulées avec des procédures bien établies auprès de l’Etat de Fribourg pour les zones d’interdiction de vol.

Vous avez récemment entreprit les démarches afin de pouvoir voler selon la nouvelle réglementation européenne en Suisse. Quels ont été les challenges de ces démarches ?

Frédéric (Secteur du Cadastre) :  Malgré notre expérience de pilotage, le premier challenge a été de lister concrètement ce que cette nouvelle loi imposait, et surtout de comprendre comment trouver une solution adaptée à nos besoins.

Un autre challenge était d’appliquer une série de mesures afin de minimiser les risques au sol tout en gardant un maximum de possibilités dans la variété de nos tâches avec le drone. Avec l’aide d’UASolutions Sàrl, la démarche a été plus digeste et nous a rapidement permis de trouver les bons compromis pour l’obtention d’une autorisation de vol afin de faire voler le drone en ville.

Pourquoi pensez-vous que le drone pourra être utile à l’avenir ?

Frédéric (Secteur du Cadastre) :  A l’avenir, j’ai bon espoir de développer pour la Ville de Fribourg des contrôles thermiques d’installations solaires et pour la déperdition de chaleur de bâtiment.

Merci beaucoup Frédéric pour cet entretien.